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REGISTRES DU BUREAU
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Devant le Sepulchre W.
catherine a regi le navire de fu ance, quand les vent! forcenez la tourmentoient de flotz, Mille et mille travaux a porté sur son dos, qo'elle a tous surmontez par longue patience.
Ceste Royne qui n'eut sa pareille en prudence, Veillant pour ses enfans, noz princes, sans repos, au temps qu'un chaste amour vint allumer leuks os, Les faict Roynes et Rois par nopciere alliance.
C'est elle qui l'olive en la France rameine,
Alliant nostre Roy à la race germaine,
d'où vient à ce royaulme ung bonheur renaissant.
Et Paris qui la voit si sage et si prudente, luy donne de junon la figure presente, Ensemble corps et biens d'ung cœur obeissant.
Et à ung autre costé, estoient escriptz ces vers la­tins:
JuKXERAT ITALLE QH.E RUBENS OMINE FAUSTO JuNO JOVI GALLOS, NUNC PROXURA JUNGIT EOSDEM GeR.MANIS, UT TRES POPULOS CONJUNGAT IN UNUM, INVICTUM REUQUIS QUOS MAGNUS CONTIXET ORRIS.
Et à ung autre costé, estoit escript en grec : EiS rÀMON HPÔON TAIMfH nOTIÉPXETAI HPH. Voulant dire :
AUX NOPCES DES GRANDZ RoYS JuNO FAISANT HONNEUR,
Assiste voluntiers, pour leur porter bonheur'3'. [B]
En l'honneur duquel mariage estoit devant la Fon­taine de Sainct Innocent ung aultre grand colosse, de pareille haulteur que celuy de Junon, porté sur pareil pied destail et stillobate de la mesme mesure, forme et enrichissement. C'estoit la figure du dieu Hymenée en forme d'ung jeune homme, embelly d'une petite barbe follette, crespelue, et longs che­veux, ll avoit quatre flambeaux à l'entour de luy, ct ung qu'il tenoit en l'une de ses mains, faisant le cin­quiesme, pour ce que le nombre quinaire est dedié à ce Dieu. Delaquelle façon ont usé les anciens Ro­mains au jour de leur mariage, et en l'honneur d'icelluy Dieu, faisoient allumer cinq flambeaux du­rant la premiere nuict de leurs nopces.
Dc l'aultre main il tenoit ung voile de couleur jaulne, duquel les espouzées souloient cacher leurs visaige à la premiere veue de leur mary, à fin qu'on
Et pour ce que l'heureux et bien fortuné mariage du Roy est la principalle cause de nostre félicité presente, fut mis devant le Sepulchre une grande forme de perron, à l'entour duquel estoient deux marches basses, sur lesquelles estoit porté un grand stillobate d'ordre tuscan et dorique, de douze piedz de hault; duquel les plainctes à l'entour des encoi-gneures estoient feintes par assiettes de rusticque, dont le fond de chacun carré representoit une pierre de marbre mixte, sur laquelle estoit posé ung pied d'eslail. Aux quatre coings estoient quatre aigles feintz de bronze, portans festons de lierres, et au dessus une pille servantde marche pied pour porter ung grand colosse de dix piedz de hault, qui estoit une Nopciere Junon qui préside aux mariages, eu l'honneur de la Royne, sa Mere, laquelle ne s'est contanlée d'avoir sainctement endoctriné Messieurs ses Enffans et nourry dès Ieur jeunesse en la relligion ti'ès saincte et catholique, soustenu à cause de leur minorité lant de grandz et insupportables affaires, auroit d'abondant comme très soigneuse mere pour­chassé la plus grande et insigne alliance de toute l'Europe, et marié nostre Roy avec Madame Elizabel d'AusIriche, fille de l'Empereur Maximilian, en l'in­tention de ne moings faire à l'endroict de Messeigneurs ses freres, et de les allier avec le temps aux plus grandz Monarques, afin d'avoir ce bon heur de veoir des enffans yssuz des siens, qui à la façon des cicognes la puissent honorer, révérer el soustenir en sa vieil­lesse, ainsi qu'avec si grande diligence et soucy elle les a nourriz et préservez en leur si bas aage, et estans demeurez orphelins de leur pere et sei­gneur.
Ceste Junon estoit faicte d'estuc si blanc el bien taillé qu'il n'y avoit celluy qui ne le print pour vray marbre. Elle estoit habillée à l'antique, ayant ung sceptre d'or en la main, ung croissant près sa teste, en ses piedz des patins dorez, et l'Iris ou Arc en ciel près d'iceulx, avec l'oyseau duquel Theocrit faict men­tion en son livre. Au bas de laquelle estoit ung grand tableau, dedans lequel estoit escript ce son­net f2':
W Ce titre n'a pas été reproduit dans le texte imprimé ni dans le manuscrit B. L'église du Saint-Sépulcre était bâtie rue Saint-Denis, entre l'église Saint-Leu et la rue Aubry-le-Boucber. Elle fut vendue comme propriété nationale en 1791, et l'on construisit sur son emplacement ce pâté de maisons qu'on a appelé la Cour batave.
W Daus le texte imprimé, viennent à la suite ces mots (fol. 27), disposés en titre : Sonnet de Pierre de Ronsard.
(3) En cet endroit, dans l'imprimé, se trouve la quatrième gravure représentant la décoration devant le Sépulcre (fol. 28 v°), précédée de ces mots : "Le surplus des singularités qui y estoient se pourra considérer par le porlraict qui en est ici representé-.